16 Juillet 1807

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In this issue, Pétion and his army are accused of lying to the public about their confiscation of the former Empress, Marie-Claire Heureuse Dessalines’, “house and money.” The report also decries as false claims coming out of Port-au-Prince, which inaccurately suggested that André Vernet and Magny, two important members of Christophe’s government and army, had defected to the southern republic of Haiti. Vernet, in fact, would stick with Christophe until his death, which Vastey reported in his 1819 Essai to have occurred on the 25th of December, 1813.

*Provenance: British Library

(  N u m é r o   11.  )

                                                                                                                                                           

GAZETTE OFFICIELLE

d e

L’ É T A T   D ’ H A Y T I,

Du  J e u d i   16  Juillet  1807 , l’an quatrième de l’indépendance.

                                                                             

Chaque Peuple , à son tour , a brillé sur la terre.

Voltaire , Mahomet.

                                                                                

E  T  A  T    D ’ H  A  Y  T  I.

Suite des Réflexions sur le prétendu

S É n a t  du  Port-au-Prince.

M a i s  quel est cet individu , à la mine sournoise , au maintien composé , qui rôde et furete en tout lieu ? C’est ce vrai renard par l’odeur alléché , toujours présent à toutes les curées , ne vivant qu’aux dépens de celui qui l’écoute , et ne s’endormant jamais sans qu’il n’ait tombé dans ses pattes quelques poules à plumer. L’œil doucereux et hypocrite avec lequel il convoite sa proie ; le miel de la persuasion qui découle de ses lèvres , vous indiquent assez que vous voyez le fameux Daumec , Daumec , ce chevalier d’industrie , qui a fait plus de dupes en sa vie , que Bonnet ni Blanchet aîné n’ont volé d’écus ; les rides qui sillonnent son front , sont moins nombreux que ses exploits ; il songe encore à cette place brillante , où nommé inspecteur général des cultures de la province du Nord , il invoquait la Lune pour que sa lueur traîtresse n’éclaira pas le transport nocturne de ses rapines et ne trahît ainsi ses plus chères espérances. Examinez comme il promène autour de lui des regards pénétrans ! c’est qu’il s’ingénie à découvrir , parmi ceux qui l’entourent , quelque nouveau débarqué de l’humeur confiante du défunt général Geffrard , sur les débris de la fortune duquel il puisse élever une nouvelle maison de commerce à l’instar de celle de Jérémie. Semblable à l’araignée hideuse qui , après avoir tendu la toile qui doit empêtrer sa pâture , se tapit dans un coin à l’abri des coups de balai ; Daumec le fourbissime, se cachant derrière le rideau , épie en tapinois le mouvement des filets qui correspondent à chacun de ses doigts , pour , au gré de son instinct , sauter sur sa victime ou recourir à la fuite. C’est ainsi qu’après avoir savamment prélude à divers événemens sinistres , ce séditieux a su , soit par la voie de l’émigration , soit par une mutation précipitée de département , dérober sa tête aux foudres qu’il avait lui-même allumés. Ce lâche agitateur vient de donner une nouvelle preuve de ce que j’avance , dans l’attaque dernièrement dirigée contre le Port-aux-Crimes ; il a démontré , par des faits irrécusables , qu’il n’avait rien perdu de son agilité ni de ses facultés habituelles ; car à peine s’est – il apperçu que le péril approchait , que sautant sur son cheval , il s’est rendu , tout d’une haleine , du sénat au pont de Miragoâne , où il eut bien de la peine à reprendre ses esprits , malgré les secours et les soins de plusieurs personnes intéressées à son sort comme à sa fuite ; mais notamment de Théodat Trichet , qui lui fit voir , en cette occasion , qu’il n’était pas le seul à qui la nature indulgente eût donné des ailes.

Non loin de ce tartuffe , ne reconnaissez-vous pas par son ampleur et sa rotondité le faux, l’ingrat Télémaque ? Le faux

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Télémaque , puisqu’après avoir , long-temps , donné à ses concitoyens des preuves de moralité et de civisme , il s’est enfin déshonoré , en trahissant leur confiance et en devenant un vil renégat ; l’ingrat Télémaque , puisqu’après avoir été deux fois sauvé par l’officieuse entremise d’un Chef puissant , tant sous le gouvernement du général en chef Toussaint Louverture , que sous le règne de l’empereur Jean-Jacques Dessalines , il a eu l’indignité de méconnaître ce bienfait et d’insulter à son libérateur , en prenant place au milieu de ses plus cruels ennemis. Cette flatteuse condescendance de la part du généreux Chef l’avait précédemment enhardi à poser zéro et à retenir le reste dans les différens inventaires auxquels il assistait en qualité de contrôleur . Là, de concert avec son compère Lamothe Aigron , qui , je ne sais par quel hazard , se trouvait toujours à ces sortes d’opérations , il entonnait bachiquement le duo des Deux Avares : De moitié nous serons ensemble. Comme il représente avec dignité cet individu , plus propre à l’office et à la cave , qu’à l’assemblée où il ronfle sans cesse ! car , il faut l’avouer , malgré sa jactance , il a plus de capacité dans le ventre et dans le gosier , que par tout ailleurs.

Qui sont les trois sénateurs qui réveillent Télémaque de son assoupissement ? Dépeignez – moi ces personnages ; ce sont Frenelle , Charles Daguille  et Ferrier. Le premier , honnête négociant , être nul et passif ; le second , acteur insignifiant , vulgairement connu sous le nom de bouche trou ; et le troisième , galant homme , qui avait si bien prononcé son caractère , qu’il faut laisser au temps le soin de justifier ou de condamner l’opinion qu’on en a jusqu’ici conçue.

La suite au Numéro prochain.

                                   

Suite du Rapport sur l’Expédition des Gonaïves.

C’est de ce nouveau Coblentz que quelques partisans de Pétion , entièrement dévoués à ses machinations ténébreuses , sous la ridicule dénomination de frères de poil , entretenaient des relations suivies avec le Port – au – Prince , et rendaient compte a l’ennemi des moindres mouvemens de notre armée. Tous ceux qui , par principe ou par inclination , refusaient de se ranger à leur opinion , étaient qualifiés de faux frères , épithète d’autant plus honorable pour eux , qu’elle était la marque certaine de la pureté de leurs intentions.

L’arrestation subite et nécessaire de quelques-uns de ces conspirateurs , semblait avoir intimidé les autres et arrêté le mal dans tous ses progrès ; mais ce n’était qu’un feu enseveli sous les cendres , qui devait bientôt se reproduire avec plus de violence. A peine S. E. Le Président de l’Etat d’Haïti fut-elle partie de cette ville , où elle avait été obligée de se rendre , vu l’absence du Surintendant général des finances , qui , depuis quelques jours , se trouvait au Gros – Morne, à l’effet d’y réprimer quelques mouvemens insurrectionnaires , qu’une expédition de 16 à 17 voiles, parmi lesquelles ont distinguait plusieurs bâtimens américains , entr’autres le trois mât d’un certain aventurier nommé Lewis, créature servile et déclarée du traître Pétion , parut devant les Gonaïves , le 28 du mois de Mai , ayant à leur bord une certaine quantité de troupes de débarquement.

Telle était la profonde sécurité du général Magny , qui commandait alors aux Gonaïves , que méprisant l’aspect de ces voiles , il ne les considéra que comme des bâtimens qui se rendaient à la Baie des Haines , pour y dérober du sel , genre de contrebande qui s’excuse fréquemment en cet endroit. Ce général faisait même si peu de cas de cette apparution , qu’ayant été avisé que le soir même un débarquement avait été effectué au lieu dit Lapierre, il ne s’en mit nullement en peine , conjecturant que l’unique but de cette opération était de chercher à enlever quelques bestiaux qui pouvaient se trouver sur les hattes voisines de cet endroit. En conséquence aucune mesure sérieuse ne fut prise , ni pour mettre la ville sur un pied de défense respectable , ni pour renforcer la garnison , qui ne s’élevait , en ce moment , qu’à une soixantaine d’hommes , le reste de la demi-brigade était occupé , sous les ordres du général Vernet , à rétablir le calme dans le quartier du Gros-Morne.

Ce ne fut que lorsque les révoltés étaient en pleine marche sur la ville , que la générale fut battue , et qu’on se mit en devoir de leur résister. Les rebelles , au moyen des intelligences qu’ils avaient pratiquées et à l’aide de quelques malheureux habitans des Gonaïves qui les avaient pilotés ( guides

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dont la lâcheté et la perversité ne peuvent être comparées qu’à la conduite criminelle qu’ils ont tenue au Port-au-Prince ) passèrent par des chemins impraticables , pénétrèrent , de tous côtés , dans une ville ouverte et sans défense , et ne purent cependant s’emparer de la faible garnison qui, quoique surprise , réussit , par sa fermeté , à se faire un chemin au travers des ennemis.

Le général Magny , à la tête de cette poignée de troupes , à laquelle s’étaient ralliés les habitans de cette ville , restés fidèles au Gouvernement , leur disputa le terrein avec l’acharnement le plus opiniâtre. Une pièce de canon qu’il fit sur le champ placer devant la maison du Surintendant général des finances , servie par d’habiles canonniers , fit un carnage horrible dans les rangs des révoltés , qui se pressaient en foule , excites par l’ardeur du pillage , objet essentiel de cette expédition ; mais quelque glorieuse que fût sa défense , ce général , voulant conserver la vie des braves gens qu’il avait sous ses ordres et réserver leur sang pour une occasion plus favorable , abandonna la place , après l’avoir jonchée de cadavres , et se retira sur l’habitation Pongaudin , distante d’une demi-lieue de la ville , où il s’est constamment maintenu , pendant l’espace de huit jours , sans que les révoltés ayent osé venir l’y attaquer , sans même qu’ils ayent essayé de dépasser les limites de la ville , quoique leurs partisans se fussent empressés d’aller grossir le nombre , et notamment un nommé Audigé , secrétaire du général Magny , que ce chef avait comble de bienfaits et honoré de la plus entière confiance.

Au premier bruit des événemens survenus aux Gonaïves , S. E. le Président , qui était dans  les doubles montagnes du quartier des Moustiques , à l’effet d’appaiser les troubles qui y régnaient , et d’y ramener le calme par sa présence , partit , en toute diligence , avec les troupes qui composaient sa garde , et se rendit aux Gonaïves , où il fut , à l’instant , seconde du général Magny , qui , renforcé de deux bataillons de la 6e demi-brigade , que le général Raphaël lui envoyait de la Marmelade , brûlait d’en venir aux mains.

A peine S. E. le Président eût-elle envisagé la face des choses , et reconnu la position et les moyens de l’ennemi ; elle ordonna , sans perdre de temps , au général Magny et au colonel Jason, commandant la 2e demi – brigade , d’aller déloger les rebelles , et les précipiter dans la mer. Cet ordre fut aussitôt exécuté que donné ; nos troupes , avec une mâle assurance et l’arme au bras , entrèrent en ville. A leur abord , les révoltés , saisis d’effroi , sans même songer à faire aucune résistance , évacuèrent la ville pêle-mêle et en désordre , et coururent se jeter en foule dans les deux forts du bord de la mer , qu’ils avaient relevés et mis en état de défense ; mais ni leurs travaux , ni leurs canons , ni même les bâtimens qui s’étaient embossés pour les protéger , ne purent les mettre à l’abri de nos attaques et ralentir l’ardeur de nos soldats.

En vain l’ennemi dirigeait sur nous tout le feu de son artillerie ; nos braves , ne cessant de travailler , parvinrent à placer leurs gabions et à établir des batteries. Une pièce de 12 , en attendant d’autres d’un plus fort calibre , fut alternativement appointée , avec le plus grand succès , sur divers bâtimens dont plusieurs se trouvèrent fort endommagés. Ce dont il nous a été facile de nous convaincre , par l’empressement qu’ils ont apporté à filer leurs cables et à gagner le large , pour se mettre hors de toutes nouvelles atteintes.

Il est remarquable qu’a l’approche de nos troupes , Bazelais , ne croyant pas sa vie en sûreté à terre , s’est réfugié à bord d’un bâtiment , où il s’est constamment tenu pendant la durée du siège , continuant de donner ses ordres d’un endroit où ses jours étaient hors de tout dangers.

Après trois jours de canonnade ( depuis le 7 jusqu’au 9 de Juin ) pendant lesquels nous avons foudroyé un grand nombre de rebelles , ils furent forcés d’évacuer totalement la place , dans la nuit du 10 , laissant le rivage couvert de morts , de mourans et de blessés ; ils étaient dans la plus affreuse nécessité , et n’ont dû leur salut qu’à la fuite et à l’obscurité de la nuit. Tous leurs bâtimens étaient à la voile , le 10 au matin , et cinglaient vers le Port-au-Prince.

Cependant une force armée, commandée par le rebelle Pétion , était partie du Port-au-Prince le 26 Mai dans l’intention d’attaquer le fort du Boucassin ; le brave général Pierre Toussaint , qui commandait le cordon de l’Arcahaye , fit rentrer toutes

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les troupes dans le fort , où il fut attaqué vigoureusement par les rebelles. Trois fois ils livrèrent l’assaut , et trois fois ils furent repoussés. Après six jours de blocus , ce général , qui n’avait pas eu le temps de s’approvisionner , voyant ses vivres consommés , se détermina à faire retraite sur Saint-Marc , présumant que l’ennemi ne se porterait pas sur cette ville ; c’est ce qu’il exécuta avec autant de sang froid que d’habileté ; malgré toutes les précautions que prirent les révoltés pour entraver sa marche ; il amena avec lui ses blessés , les chevaux et les bagages de ses troupes. Le 6 de Juin , les ennemis parurent devant la place de Saint-Marc ; mais le général Pierre Toussaint y était déjà entre avec des forces suffisantes pour défende la place.

S. E. le Président , instruit que les révoltés étaient en présence de St Marc , avait donné ordre de ne pas les attaquer , en recommandant seulement de les amuser jusqu’à son arrivée , se promettant de leur donner une leçon si complète , que jamais l’idée d’une semblable tentative n’eût pu à l’avenir leur entrer dans l’esprit. Le général Pierre Toussaint n’ayant pas reçu ses ordres à temps , fit sur eux une sortie où il obtint de brillans succès . Le même jour de cette affaire , Pétion ayant eu vent de la prochaine arrivée de S. E. le Président à St-Marc (arrivée qu’il redoutait déjà si fort ) ordonna à sa bande de faire retraite et pour mieux favoriser sa fuite , fit signifier à Bazelais d’avoir à se tenir par les travers de Saint-Marc , avec les autres bâtimens qui venaient d’évacuer les Gonaïves ; mais Bazelais lui fit réponse que les bâtimens n’étaient pas en état de soutenir la mer plus long-temps, ayant été considérablement endommages par le feu qu’ils avaient supporté aux Gonaïves.

Aussitôt que le général Pierre Toussaint s’apperçut du mouvement rétrograde de l’ennemi , il se mit à sa poursuite , et s’avança jusques sur le territoire de l’Arcahaye , sans avoir pu le joindre; tant il avait mis de célérité dans sa fuite ! Quelques traîneurs et une barge faisant partie de la flottille sortant des Gonaïves sont tombés en son pouvoir.

Quel fruit ont recueilli les rebelles de leurs criminelles entreprises ? la honte d’une fuite précipitée et les remords ( si toute fois leurs cœurs en sont encore susceptibles ) d’avoir entraîné la perte de leurs concitoyens et d’avoir plongé dans la plus affreuse misère des femmes , des enfans et des vieillards qui ont fui de leurs demeures et de leurs habitations dévastées pour se réfugier dans les bras de S. E. le Président ?

Quoique le révolté Bazelais ait l’impudeur d’avancer dans un rapport mensonger qu’il fait au cannibale Pétion , que la maison et les propriétés de l’infortunée veuve Dessalines ont été respectées , cette honorable Dame n’en a pas moins vu disparaître ses maisons et sa fortune. Ce personnage , digne en tout du mépris public , ne peut en imposer qu’à ceux qui ne savent pas de quoi sont capables les monstres encore teints du sang de son auguste époux , qui viennent tout récemment , aux Gonaïves , de lui ravir les tristes débris de sa fortune. Il fait un nouvel outrage à la vérité , lorsqu’il prétend que les chapeaux galonnes des généraux Vernet et Magny sont tombés en ses mains. Ce fait est de la plus grande fausseté. Le général Vernet arrivait malade du Gros – Morne lorsque les rebelles ont paru ; il n’a eu que le temps de monter à cheval et de se retirer à la Petite – Rivière des Gonaïves ; à peine ce chef estimable a-t-il pu se tenir à cheval pendant ce court trajet ?

Le général Magny , bien loin de se trouver dans une position à perdre son chapeau , a constamment tenu l’ennemi en échec par sa contenance vigoureuse , et s’est enfin frayé un noble passage à travers les ennemis qui , non-seulement n’ont pas été tentes de le chagriner dans sa retraite , mais n’ont pas même osé s’éloigner de l’enceinte de la ville. Sans doute Bazelais s’efforce , par de telles impostures, de laver ou de pallier la honte que Pétion et ses complices ont essuyée à Sibert , lorsque dans une déroute à  jamais mémorable , ils ont laissé leurs chapeaux galonnés sur le champ de bataille , pour accélérer leur fuite ; mais il se trompe grossièrement , c’est un souvenir qui ne s’effacera pas sitôt de la mémoire de ceux qui ont assisté à la glorieuse journée du 1er Janvier 1807.

La Suite à l’ordinaire prochain.

                                                                                                                                                           

Au Cap , chez P. R o u x , imprimeur de l’Etat.

9 Juillet 180723 Juillet 1807

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