24 Décembre 1807

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This issue begins with a commentary on a speech given by Napoleon Bonaparte, excerpted from L’Ambigu. The selection printed here mentions Bonaparte’s recent treaty of peace with the Emperor Alexander I of Russia. The writer casts suspicion on the the First Consul of France’s motives, however, by suggesting that he duplicitously entered into this “contract” solely “with the intention to subsume the Russian empire into his own.” The issue finishes with a rundown of foreign ships entering and leaving the ports of Haiti, demonstrating once again a robust environment of international trade between Haiti and its Atlantic neighbors.

*Provenance: British Library

 

(  N u m é r o   34.  )

                                                                                                                                                           

 

GAZETTE OFFICIELLE

d e

L’ É T A T   D ’ H A Y T I ,

 

Du  Jeudi  24 Décembre 1807 , l’an quatrième de l’indépendance.

                                                                             

Chaque Peuple , à son tour , a brillé sur la terre.

Voltaire , Mahomet.

                                                                                                                 

 

Sur le Discours de B u o n a p a r t É.

 

A v a n t  d’entrer dans l’examen de ce discours , qui ouvre le champ le plus vaste aux conjonctures politiques , nous ne pouvons nous dispenser d’indiquer ici le caractère particulier dont sont empreints les discours que Buonaparté prononce publiquement. C’est alors qu’il semble n’emprunter le secours de personne pour exprimer sa pensée , et qu’il dédaigne la précision ou la correction du langage qu’on remarque dans ses bulletins ou dans ses proclamations. L’orgueil , l’ambition , le tourment des passions les plus impétueuses, des inclinations les plus féroces , se montrent à découvert dans ses expressions brusques et incorrectes , dans ses phrases isolées. Comme , si en le douant de toutes les qualités qui sont funestes au genre humain , la Providence avait voulu que son instinct le trahît quelquefois et l’offrît tel qu’il est à la terre épouvantée. Rien de ce qu’il dit ne doit être pris dans son sens propre ; il faut toujours l’expliquer d’après son caractère connu. S’il annonce qu’un souverain lui doit son indépendance , il faut entendre qu’il lui a ravi ses dignités, sa liberté , son honneur , et qu’il l’a rangé au nombre des tristes esclaves que sa protection avilit et opprime. S’il annonce que des peuples ont recouvré leur patrie et leurs droits ; il faut entendre qu’il les a vendus sans leur aveu à un nouveau souverain qui leur répond de leur soumission , ou qu’il leur a donné des lois incompatibles avec leurs mœurs et leurs habitudes pour les lier à son système d’anarchie monarchique. S’il parle de la joie des nations en voyant ébranler le seul appui qui reste encore à l’ordre social (l’influence de l’Angleterre ) on doit entendre que les souverains trahis ou subjugués , que les peuples consternés ne font plus que des vœux secrets pour le succès de cette influence , et qu’un voile funèbre enveloppe l’Europe continentale. Son langage , quelque modéré qu’il paraisse , trahit encore plus les rêves sanglans qui l’agitent , que ne pourraient le faire les expressions les plus emportées. S’il parle de paix , déjà il a jeté les semences de guerres nouvelles , déjà il a donné le signal à ses légions pour leur indiquer la proie qu’il n’avait jusques-là ménagée que par politique. S’il affecte d’éprouver un sentiment humain ou généreux , il a soin d’y mettre un correctif qui flétrisse toutes les

 

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espérances qu’il pouvait donner à ses victimes , comme s’il craignait qu’on pût croire qu’il tient par quelque côté consolant à l’humanité. Soit qu’il se montre à la tête de ses armées , soit qu’il paraisse au sein de ses corps déliberans , le monde doit s’attendre à de nouvelles calamités.

En voyant la manière vague dont il parle des nouveaux triomphes , des nouveaux traités de paix qui ont changé la face politique de l’Europe , on se demande pourquoi il a renoncé tout à coup à la forfanterie qui distinguait ses bulletins ; pourquoi il ne cite point ces victoires si pompeusement décrites dans ces romans de la campagne qu’il vient d’achever , ni ces traités de paix dont autrefois il aurait vanté les avantages, lorsqu’ils étaient conclus avec des souverains dont ils consommaient la ruine ou le déshonneur. La France pourrait lui demander quels bienfaits, quelle prospérité ces peuples dont le bonheur lui est , dit il , plus cher que sa propre gloire , peuvent attendre de ses nouveaux triomphes ; pourquoi cette longue campagne et ces batailles sanglantes dans des contrées lointaines ; pourquoi une génération toute entière a été arrachée du sein de la patrie et exposée sans précaution à des périls sans nombre , à des fléaux de tout genre ; pourquoi la fleur de son armée et de ses officiers a été sacrifié à une obstination aveugle qui a voulu triompher des rigueurs de la saison , de l’influence du climat et de la résistance d’une armée qui , si elle eût mieux commandée , aurait entièrement anéanti la sienne. A-t-il même obtenu le but qu’il se proposait ? Non , car il n’a point arraché la Pologne aux puissances qui l’avaient partagée , et il s’est vu lui-même obligé de démentir les proclamations factieuses dans lesquelles il lui annonçait un libérateur. C’était là qu’il voulait faire régner ce qu’il ose appeler un prince français.

Après avoir échoué dans cette tentative , il a composé d’élémens hétérogènes ce royaume de Westphalie , qui n’est qu’un assemblage des dépouilles de quelques princes dont le seul tort a été la position que leurs états occupaient en Allemagne. Ainsi la nation polonaise n’a recouvré ni son nom ni son existence ; et cet homme infaillible , qui rétabli les peuples dans leurs droits et les souverains dans leur indépendance , a été obligé de consacrer lui-même le partage du royaume dont il voulait restaurer l’intégrité. Ainsi le résultat d’une campagne si sanglante a été l’érection d’un nouveau trône pour un individu de la famille de Buonaparté ! C’est à cela que les contributions et la population de la France ont été employées ! Buonaparté sent bien lui – même que cette réflexion peut frapper tous les esprits , car il se hâte de la contrebalancer en parlant aux français de leur indépendance , et en leur montrant l’état d’abaissement où il a mis la Prusse , comme une punition des efforts qu’elle tenta autrefois contre leur révolution naissante. Cependant , par une déviation subite , il annonce que cette puissance , qu’il avait châtiée pour s’être liguée autrefois contre l’indépendance de la France , a été rétablie pour prouver sa sincère amitié au puissant empereur du Nord. Le bien de l’état n’a donc point été consulté dans cette restauration , elle est donc le fruit d’un caprice de sentiment dans lequel Buonaparté n’a consulte que sa propre satisfaction et les instances d’un souverain qui , aussi , s’était ligué contre ce qu’il appelle l’indépendance de la France !

Le titre pompeux de puissant empereur du Nord que Buonaparté a donné à l’empereur Alexandre , n’annonce aux yeux du froid spectateur , que l’intention où il est d’assujettir l’empire de Russie à son système. N’ayant pu ranger cette puissance , encore intacte , au nombre de ces tributaires , il veut au moins entrer avec

 

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elle dans un contact qui , sous un prétexte d’agrandissement ou d’illustration , compromettra d’abord son honneur et détruira ensuite son indépendance. Il ne faut pas s’y tromper : Buonaparté est aussi malintentionné quand il loue que quand il outrage ; ses bienfaits sont aussi empoisonnés que ses vengeances sont redoutables. Il a sorti les électeurs d’Allemagne du rang qu’ils occupaient dans la hiérarchie politique , afin de leur donner des titres qui , quoique plus relevés , confirment leur avilissement en garantissant leur soumission , semblables à ces esclaves qu’on oblige à quitter le nom qu’ils portaient avant leur servitude , afin de leur en donner un qui les assimile à leurs compagnons d’infortune. L’empereur de Russie devra aussi consentir à recevoir un titre et des territoires de cet homme qui flétrit , par ses dons , ceux qui n’a pu subjuguer par ses armes. Ce prince doit cependant apprécier de quelle valeur est la concession que Buonaparté lui a faite en faveur de la Prusse , s’il comprend le véritable sens de la phrase dans laquelle celui-ci lui annonce l’érection d’un nouveau royaume en faveur de son frère : Un prince français régnera sur l’Elbe ; cette phrase renferme les destinées de la Prusse et celles de la Saxe. Qu’on envisage les pays que ce fleuve arrose et l’on verra de quels territoires sera composé un jour ce royaume qui n’a pas encore d’existence , que déjà on change le nom qu’on lui a donné dans les traités , et qu’on lui prépare de nouveaux appanages. Ici on a lieu de s’étonner , qu’en parlant du nouveau roi , il n’indique point quelle est la maison souveraine qui sera déshonorée par son alliance , quelle est la princesse infortunée qui sera livrée à ce misérable , comme ces enfans qu’on jetait à Carthage entre les bras d’une statue d’airain , d’où ils tombaient dans une fournaise ardente , pour appaiser une divinité malfaisante et barbare.

Sans doute il lui en aurait trop coûté de laisser entrevoir que l’homme qui renverse et élève les trônes , qui est l’effroi des nations , n’a pas pu vaincre les résistances d’une fille jeune et timide , qui lui a opposé le courage de l’honneur et de la vertu , ou qu’un prince qui n’a pas osé refuser la couronne dont il a flétri son front , a cependant bravé sa vengeance pour soutenir sa noble famille dans les refus que lui dictait sa conscience. C’est là sans doute ce qui a engagé Buonaparté à montrer de quels vastes territoires sera un jour composé l’appanage de son frère , à annoncer au roi de Saxe que ce qu’il n’a pu obtenir par une alliance qui enclavait le royaume de celui ci dans celui de Westphalie , est déjà regardé comme une propriété de la famille Buonaparté.

Après avoir parlé de ce qu’il a fait en considération de l’amitié que lui inspire le puissant empereur du Nord , de ce qu’il va faire en faveur d’un individu de sa famille , de l’indépendance rendue à la Saxe , des droits et de la patrie restitués aux peuples de Varsovie et de Dantzick , Buonaparte annonce sans aucune transition , et comme si cette idée se trouvait liée aux précédentes , que l’influence de l’Angleterre sur le continent est détruite sans retour. On voit qu’il était impatient d’arriver à ce qui est l’objet de toutes ses sollicitudes et de tous ses efforts , à ce qu’il n’obtiendra jamais que momentanément , à ce qui fait le désespoir de son orgueil. Il sait bien que cette influence , dont il a suspendu pour quelques jours la puissance et l’activité , se montrera chaque fois qu’il se montrera sur le continent un peuple , un souverain , qui voudront s’armer pour la liberté de l’Europe ; qu’elle ne sera jamais découragée par les revers , parce que c’est la constance de la vertu , qui finira par triompher des attentats de la violation.

La suite au Numéro prochain.

 

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La frégate anglaise le Comus , de 22 canons et 147 hommes d’équipage , capitaine Heywood, a pris à l’abordage , dans le détroit du Sund , le 15 Août , la frégate danoise le Frederickscoarn , de 32 canons et 229 hommes. Le danois a eu 12 hommes tués et 22 blessés , tandis que la frégate anglaise n’a eu qu’un homme blessés dans cette brillante affaire , qui ajoute un nouveau laurier à la marine britannique.

Un ordre du conseil privé de sa majesté britannique permet d’accorder des lettres de marque et de représailles contre les bâtimens danois , et enjoint de détenir et arrêter ceux qui se trouvaient dans les ports britanniques. On y en compte déjà plus de 300 détenus , parmi lesquels est un vaisseau allant de Batavia à Amsterdam, avec des propriétés danoises , valant plus de 150 mille livres sterlings. A ce moyen , les consciences de certains honnêtes gens de Tonningen et de Copenhague seront soulagées pendant quelque temps de la nécessité de faire leurs faux sermens accoutumés.  Les swearing clerks hors d’emploi, peuvent s’enrôler dans les volontaires de leur pays , et servir contre d’Angleterre d’une autre manière , ad utrumque parati.

Les ordres sont partis pour attaquer les îles de Saint Thomas et de Sainte-Croix dans les Antilles. Qui n’a plus rien a sauver n’a plus rien a dissimuler. On va bientôt en apprendre de belles sur les mystères d’iniquité que couvraient les pavillons neutres dans les deux Indes. Si le tour des Etats-Unis arrive , il ne manquera pas de matériaux pour compléter alors un grand ouvrage sur la théorie du parjure.

                                                                        Extrait de l’Ambigu.

                                                     

 

A    V   I   S.

      On s’abonne chez M. Juste Hugonin , rues Neuve et Saint-Laurent , No 50.

Le prix de l’Abonnement est de douze Gourdes par An , on ne souscrit pas pour moins de quatre mois , payables d’avance , ou une Gourde et demie par mois.

                                                     

A   V   I   S.

  1. En conséquence du décès de notre digne et respectable associé feu James Wilson , nous prévenons le Public que la Maison qui a existé sous la raison de D’Arcy , Didier et Compagnie , se liquide , et n’existe plus dès ce jour.

Toutes les dettes contractées , ou créances appartenantes à ladite Maison , seront acquittées et reçues par nous soussignés.

Nous prévenons en même temps que les nouvelles affaires seront , dorénavant , dirigées par MM. J. N.  D’Arcy , Henry Didier et James Freeman , sous la raison de D’Arcy , Didier et Freeman.

Cap , le 4 Décembre 1807.

D’ARCY , DIDIER et Compagnie.

                                                                                                                                                           

M O U V E M E N T   D E   L A   R A D E

Pendant le mois de Novembre.

A r r i v é e   d e   N a v i r e s.

Douze bâtimens étrangers , chargés de provisions et de marchandises sèches.

D é p a r t s   d e   N a v i r e s.

Neuf bâtimens étrangers , chargés de café , sucre et cacao.

                                                           

P r i x   d e s   D e n r é e s.

Café .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .      16 sous 6 den. la livre.

Sucre terré .  .  .  .  .  .  .  .  .     18 gourdes le cent.

brut .  .  .  .  .  .  .  .  .       8 gourdes le cent.

Cacao  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .      14 sous la livre.

Coton  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .      14 gourdes le cent.

Indigo .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .        1 gourde la liv.

Sirop ou Molasse  .  .  .  .  .   2 gourdins la velte.

Tafia.  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .      36 gourdes la bar.

Cuirs de bœufs , en poils .    6 gourdins.

moutons et cabr.   3 gourdins.

tannés  .  .  .  .  .  .  .   2 g. le côté.

Écailles .  .  .  .  .  .  .  .  .  .   2 gourd. la liv.

Huile de Palma Christi .  .     1 g. et demie le galon.

Casse médicinale .  .  .  .  . 10 sous la livre.

Confitures , sèch. et liquides.  2 gourdins la liv.

                                                                                                                                                           

A  V  I  S    D  I  V  E  R  S.

On vend chez M. Paul Lacroix , aux Gonaïves , des Alphabets pour apprendre à lire et des Cantiques spirituels .

Il a été perdu , le 11 du courant , un Portefeuille rouge , contenant des papiers. On est prie de le remettre à l’imprimerie ; il y aura récompense.

                                                                                                                                                           

Au Cap , chez P. Roux , imprimeur de l’Etat.

17 Décembre 180721 Janvier 1808

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