24 Mai 1816

About This Publication

This issue marks yet another (and the final known) change to the epigraph, which now recites the Haitian national motto, “L’Union fait la Force” or “Unity is strength.” Here, we also have  the first clear evidence that the editorship of La Gazette Royale had changed from Juste Chanlatte to Baron de Vastey. Although, Vastey does not sign the letter from the editor that appears at the outset of this issue, in his 1816 Réflexions adressées aux Haytiens de la partie de l’Ouest et du Sud, sur l’horrible assassinat du Général Delvare, Vastey refers to himself as having first given an account of President Pétion’s murder of General Delvare in this very issue of the Gazette. The account of Delvare’s murder that Vastey later references is located here under the title of, “The editor of the Gazette Royale to his Compatriots.”

*Provenance: Archive.org

 

 

LIBERTÉ , INDÉPENDANCE OU LA MORT

                                                                       

 

GAZETTE  ROYALE  D’HAYTI,

 

Du  24  Mai  1816 , treizième  année  de  l’indépendance.

                                                           

L’Union fait la Force.

                                                           

 

Au Cap-henry , le 23 Mai 1816.

 

L’Editeur de la Gazette Royale

à ses Concitoyens

 

C O N C I T O Y E N S.

 

D’autres occupations et d’autres devoirs à remplir m’ayant retardé dans la rédaction de cette feuille ; maintenant que je puis m’en occuper , je m’empresse de reprendre mes travaux et de continuer la tâche que je me suis imposée envers mes concitoyens.

 

Parler toujours au peuple avec franchise sur ses vrais intérêts , démasquer ses ennemis intérieurs et extérieurs , éclairer l’opinion publique pour la diriger vers le but que nous devons nous efforcer d’atteindre , l’extinction totale de la guerre civile et la réunion des haytiens de toutes les couleurs en une seule et même famille , sous le gouvernement monarchique et paternel de sa majesté Henry 1er, notre auguste et bien-aimé souverain ; voir régner les lois , la justice et l’équité , sans lesquelles il ne peut exister aucune stabilité pour le gouvernement , ni bonheur , ni prospérité pour le peuple ; enfin voir ma patrie libre, heureuse et triomphante de tous ses ennemis, et la nation haytienne admise à la grande association des peuples de l’univers.

 

Tels sont , mes compatriotes , mes vœux les plus ardens et les motifs qui m’ont excités à me jeter dans la carrière pénible et difficile des lettres.

 

Je ne me suis jamais dissimulé la difficulté de cette entreprise ; je n’ai pas ignoré non plus le grand nombre d’ennemis que je me serais attirés en écrivant avec vérité et impartialité , et l’infériorité de mes talens pour un sujet aussi vaste que profond et qui exige le concours des plus grandes lumières ; mais lorsque je crois que mes travaux peuvent être utiles à ma patrie, à mon roi et à mes concitoyens, toutes considérations particulières doivent cesser et je dois faire tous mes efforts pour surmonter tous les obstacles et [illegible.]

 

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De Sans-Soucy , le 23 Mai 1816 , l’an 13 de independance.

Il vient d’arriver dans cette ville , du Port – au-Prince , avec son épouse et ses enfans , le lieutenant colonel Jean Louis , chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint Henry , commandant le 1er bataillon du régiment du Mirebalais , No 10.

Ce brave officier , fatigué du désordre , de l’anarchie et des vexations de tous genres qui règnent an Port-au-Prince, en militaire talonneur, a pris généreusement la résolution de venir se rendre auprès de Sa Majesté, notre auguste et bien-aimé souverain. Nous éprouvons la plus grande satisfaction, en rapportant à nos concitoyens, la manière pleine de bonté et de clémence , avec laquelle Sa Majesté a reçu cet officier, la manière pleine de bonté et de clémence , avec laquelle Sa Majesté a reçu cet officier, et les paroles remarquables qu’elle lui a dites.

Après que cet officier eut exprimé au Roi ses sentimens , et les motifs qui l’avaient déterminé à venir implorer sa bonté et sa clémence , Sa Majesté-lui a répondu qu’elle était très satisfaite de la démarche qu’il avait faite , en venant se rendre , de lui-même , à  ses devoirs ; qu’elle désirait sincèrement que tous les haytiens qui sont encore dans l’erreur  imitassent son exemple ; que dans tous les temps elle avait fait tous ses efforts pour réunir les haytiens en une seule et même famille , et que si cette réunion n’avait pas eu lieu jusqu’à présent , et la guerre civile éteinte pour jamais , cela n’avait pas dépendu d’elle ; mais bien de l’individu qui a fait tous ses efforts pour éluder ses offres généreuses , afin de faire durer la guerre civile , perpétuer le malheur de son pays , et servir la cause des français.

Quant à Sa Majesté , elle sera toujours fidèle aux promesses qu’elle a faites au peuple haytien , en suivant un système pacifique , juste et libéral pour donner des preuves de sa ferme résolution de maintenir les officiers civils et militaires , qui reconnaîtront l’autorité royale , ou qui viendrontd’eux-mêmes se ranger sous ses drapeaux , qui sont ceux de la liberté et de l’indépendance , dans les grades et emplois qu’ils occupent , et voulant témoigner sa satisfaction, au lieutenant colonel Jean Louis, pour la démarche qu’il a faite, elle le nommait dès à présent au grade de colonel attaché à l’état major de sa maison, militaire. [Missing line] Jean Louis et à sa famille , tout ce qu’ils pourront avoir de besoin.

M. le chevalier de Saint-Louis a été extrêmement touché de la bonté du Roi, et lui en a témoigné sa vive reconnaissance; les nombreux officiers qui étaient les témoins de cette scène attendrissante , ne pouvaient se lasser d’admirer la bonté , la clémence et la générosité du Roi , notre très auguste et bien-aimé souverain.

Le chevalier de Jean Louis nous ayant donné des nouvelles du Port – au – Prince , nous nous empressons d’en donner connaissance à nos concitoyens.

Il n’est malheureusement que trop vrai que l’infortuné général Delvare a été assassiné dans sa prison dans la nuit du 15 Décembre de l’année expirée.

Voici comment cet horrible événement s’est passé.

Pétion toujours fidèle à ses maximes hypocrites de combiner le crime et de le faire exécuter par d’autres , en se tenant toujours derrière le rideau , et en faisant mouvoir les malheureux qui ont la faiblesse de servir d’instrumens à ses passions , pour jeter tout l’odieux du crime sur eux , tandis qu’il en recueille le fruit ; Pétion, dis-je, feignit d’avoir l’intention de mettre le général Delvare en liberté, les cinq années de détention à laquelle il était condamné étant expirées ; Pétion écrivit donc au général Delvare pour lui annoncer qu’il allait être libre, et qu’il l’espérait à dîner sur l’habitation Letort , à quelques milles du Port-au Prince , où il se proposait de donner un grand repas , et il partit pour cette habitation , après avoir donné ses ordres particuliers pour exécuter l’assassinat du malheureux Delvare. Quelle atroce perfidie !

Que l’on se figure quelle devait être la situation de cet infortuné , après cinq années de détention et de souffrances , espérant l’aube du jour qui devait le rendre à la liberté ; quel dut être sa surprise, lorsqu’il vit à la lueur des flambeaux les satellites de Pétion qui venaient pour l’égorger.

Cet infortuné fut baïonnetté dans son lit ; au même instant , le chevalier de l’Eveillé , le commandant Jolicœur et le capitaine Jean Pierre, qui y étaient aussi détenus , éprouvèrent le même sort. Dans la nuit même , les cadavres de ces infortunés militaires furent enlevés et jetés dans le cimetière du Port-au-Prince , privés de la sépulture. Ce n’est qu’avec beaucoup de difficultés que

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des femmes charitables obtinrent de Pétion la permission de pouvoir rendre les derniers devoirs à ces malheureuses victimes de ses vengeances.

L’assassinat du général Delvare et des autres militaires portèrent la consternation et la douleur dans tous les cœurs des bons citoyens du Port-au-Prince; il en est même parmi eux que nous regrettons de ne pouvoir nommer, de crainte de les compromettre , qui en ont été malades de désespoir.

Quelques jours auparavant , le brave et malheureux Celestin Manneville , capitaine au 10e régiment , fut fusillé au morne à Tuf , soupçonne d’avoir voulu délivrer sa patrie du monstre qui la dévore.

Louis Lerebourg , chef de bataillon au 20e régiment , eût éprouvé le même sort , s’il n’avait pas eu le bonheur de se sauver dans les montagnes du Sale Trou ; Pétion le fit poursuivre vainement , sans pouvoir l’atteindre ; mais des cinq malheureux militaires pris dans cette poursuite , deux ont été fusillés , et les trois autres plongés dans les cachets , où le même sort les attend.

Le juge de paix de Marigot , M. Pierre , a été fusillé au Port-au-Prince , pour s’être plaint que le café se vendait à vil prix ; mais le fait est qu’il était soupçonné d’être partisan du Roi.

La plus grande licence , le désordre et les vexations de tous genres règnent au Port-au-Prince; les militaires se plaignent hautement d’avoir perdu l’honneur et la gloire militaire qu’ils avaient acquis au prix de leur sang ; ils disent qu’ils ont été avilis et dégradés par Pétion , par la conduite qu’il a tenu envers Dauxion Lavaysse , le caractère vil qu’il a démontré , ses plates adulations envers les français , lui ont attiré la haine des militaires et le mépris général des haytiens.

Pétion qui a perdu sa popularité , et qui prevoit sa chûte , par les symptômes d’une insurrection général qui se fait sentir dans les esprits , et qui se manifeste déjà , de toutes parts, fait tous ses efforts pour rattraper cette poularité, que sa trahison et ses crimes lui ont fait perdre. Mais c’est en vain , il a beau multiplier ses gardes, il a beau faire des mensonges pour empêcher la vérité de pénétrer , personne n’ajoute foi à ses calomnies , tout le monde le connaît , ses manéges et ses manières hypocrites sont usés ; jamais il ne pourra diminuer l’horreur qu’il inspire aux gens de biens.

Dernièrement il a fait brûler les papiers du Roi , pour ne pas en donner connaissance au peuple ; ces papiers étaient de la plus haute importance et contenaient les preuves de la trahison de Pétion , qui ne veut rien moins que l’esclavage des noirs et le rétablissement des préjugés comme en 1789 ; c’est pourquoi il a [eu?] la précaution de faire brûler bien vîte des papiers pour les empêcher d’éclairer le peuple sur ses complots avec les blanc français. Mais l’action de cet incendiaire a retourné contre lui-même , le peuple n’en a pas été dupe ; les militaires et les cultivateurs ont improvisé des chansons , où ils disent dans la langue du pays : Si papie Roi pas té bon , yo té doé bas nous lire yo nous ta boûlé yo nous même ; més d’abord yo boûlé yo , sans yo pas fait nous lire yo , c’est signe y en nan qui chose qui té bon la-dans que yo pavlé nous connin , ya pé trahi nous.

D’autres disent relativement à nos députés , qui ont été mal accueillis par Pétion , comment donc ça fait , président recevoir blanc français là, Dauxion Lavaysse , li fermin nan chambre avé li , yo cause bien ensemble ; li fait yo fait l’assemblée pour nous té tandé ça blanc là vlé dit nous; à présent frères à nous , député à Roi , vini pour parlé avé nous , pour bien à nous , li fermin yo , li pavlé parlé avé yo ; li pas fait l’assemblée pour té tandé ça Roi vlé dit nous ; li poussé député la-yo tout de suite , et sans général Boyer qui pas té vlé , li ta fait saziner yo côté la source-piante , poutant n’a pas ça li te fait avé blanc la ; li prend lagent nan trésor li bali , avec bâtiment et li voyé lalé.

Ces murmures du peuple étant parvenu jusqu’à Pétion , il fut obligé [illegible] [illegible], et d’ordonner la plus grande surveillance pour empêcher les soulèvemens ; il fit arrêter , destituer et fusiller , sous de simples soupçons , beaucoup d’officiers ; des officiers généraux sont réduits dans la nullité la plus complète et même gardés à vue , sur les soupçons qu’ils sont les partisans du Roi ; il est presque indubitable , que quelques – uns d’eux éprouveront le même sort que l’infortuné Delvare.

Pétion est furieux de voir Sa Majesté , notre auguste et bien aimé Souverain , suivre un système pacifique , juste et libéral envers les haytiens de toutes les couleurs ; pour détruire la bonne impression que la clémence et la générosité du

 

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Roi fait sur l’esprit du peuple , il n’est point de mensonges et de calomnies qu’il n’invente pour égarer et tromper l’esprit  public. Il faut que je rapporte plusieurs de ces fourberies , pour mettre mes concitoyens à même d’apprécier Pétion , car il n’y a pas de meilleur moyen de combattre cet hypocrite , qu’en mettant au grand jour son infâme projet , et en faisant connaître son odieux caractère.

Le chevalier de Jean Louis ayant demandé à Pétion , un permis pour pouvoir se retirer dans la partie espagnole , Pétion lui dit : je sais que vous cherchez les moyens d’aller joindre le général Daux [ le duc de l’Artibonite ] mais je vous avertis qu’il n’existe plus , le roi l’a fait détruire ; je ne vous donnerai point de permis. En effet , le chevalier de Jean Louis n’aurait jamais pu obtenir son passe-port , sans l’assistance généreuse que lui a donné son excellence le général de division Boyer , qui lui a fait délivrer un permis pour lui en sa famille.

Il est presque inutile que nous disions à Pétion qu’il en a imposé ; car il est persuadé que sa grâce monseigneur le duc de l’Artibonite est plein de vie qu’il remplit la place éminente de feu prince de Saint-Marc , d’inspecteur général aux revues , et que dans ce moment il fait sa tournée pour inspecter l’armée et opérer l’habillement des troupes de toutes armes.

Monseigneur le duc de l’Avancé avait été aussi tué , suivant Pétion , et Sa Grâce est également auprès du Roi , et un de ses plus zélés et fidèles serviteurs.

Pétion , au lieu de faire des impostures , ferait bien mieux de s’occuper d’habiller les troupes qui [illegible] un [illegible] [illegible]; mais il préfère bien mieux accabler le peuple d’impôts , pour accumuler des sommes pour aller joindre ses camarades en France.

L’épouse de M. le chevalier de Jean Louis nous a raconté d’autres faits qui prouvent le caractère diabolique de Pétion; elle était présente lorsqu’un soir , le général Boyer dit à Pétion : le capitaine Clément Joly , du 20e régiment, a été pris par un patrouille du roi ; mais il a été relaxé de suite sans aucun mauvais traitemens ; tant pis s’écrie Pétion , en colère , il aurait mieux valu pour nous qu’on lui aurait coupé la tête.

Le plan machiavélique de Pétion est bien clair, c’est que lorsque l’on aurait coupé la tête à cet officier , un autre n’aurait pas eu envie de se laisser prendre ; et alors au lieu d’être en colère , vous auriez entendu Pétion , avec son patelinage et son air doucereux et hypocrite , messieurs , je vous apprends avec peine que le pauvre capitaine Clément Joly , ayant en le malheur de tomber au pouvoir d’une patrouille du roi , on a eu la cruauté de lui couper la tête; ainsi , messieurs , je vous en avertis , prenez garde à vous jusqu’à la mort.

C’est ainsi que cet infâme hypocrite à l’air de s’apitoyer sur le sort des hommes de couleur , en disant qu’on les a tous détruits ; tandis que dans son intimité , il dit à ses confidens , il existe encore dans le Nord beaucoup d’hommes de couleur qui sont attachés au Roi; mais je voudrais voir détruire ces scélérats jusqu’au dernier ; car qu’est-ce qu’ils sont à faire là ?

Tel a été dans tous les temps les maximes politiques de ce vil brigand , d’exciter les insurrections , de faire le mal , de le faire faire pour en recueillir le fruit.

Pourquoi faut il , mes frères de couleur , que vous vous êtes toujours laissé entraîner aux suggestions perfides de Pétion ? ouvrez donc les yeux sur lui ; car il veut vous entraîner dans une perte indubitable.

Croyez – vous qu’il veut votre conservation , lorsqu’il fait détruire et fusiller nos frères les noirs au Port-au-Prince, comme il est à le faire faire ? Il les a vendu aux blancs français ; il ne peut les livrer ; il les fait détruire ; croyez-vous que cet état de chose peut durer ? les noirs ne se laisseront pas détruire impunément.

Cependant nous avons acquis la conviction que les hommes pensans du Port-au-Prince préméditent un grand changement ; ceux qui paraissent les plus chauds partisans de Pétion , sont ses ennemis cachés. Nous en avons la preuve , par ce que nous a dit le chevalier de Jean Louis , qui était renfermé dans la même prison que feu le général Delvare, qui l’a instruit de bien des particularités.

Le chevalier de Jean Louis était en outre chargé , par bien des personnes, de dire des choses importantes à Sa Majesté , ce qui est encore une grande preuve que la cause du Roi , de la liberté et de l’indépendance a de zélés défenseurs dans les différentes parties du royaume.

                                                                                                                                                           

Au Cap-Henry , chez P. Roux, imprimeur du Roi.

8 Février 18166 Juin 1816

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