9 Juillet 1807

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In this issue, we find a continuation of several topics first addressed in previously published articles of the newspaper, namely, criticism of the “so-called Senate of Port-au-Prince.” An article near the end, briefly details the new labor system that would be implemented more formally with Henry Christophe’s 1812 Code Henry. The new law, dated 29 June 1807, states that “in order to improve the prospects of farmers,” the Haitian state will be compensating them for their crops at a rate “superior to that of the market.”

*Provenance: British Library

(  N u m é r o   10.  )

                                                                                                                                                           

GAZETTE OFFICIELLE

d e

L’ É T A T   D ’ H A Y T I,

Du  J e u d i   9  Juillet  1807 , l’an quatrième de l’indépendance.

                                                                             

Chaque Peuple , à son tour , a brillé sur la terre.

Voltaire , Mahomet.

                                                                              

E  T  A  T    D ’ H  A  Y  T  I.

Suite des Réflexions sur le prétendu

S É n a t  du  Port-au-Prince.

S’ i l  est un sujet d’étonnement , c’est que ces infâmes intrigans n’ayent pas senti la nécessité d’asseoir leurs plans sur des bases conformes à la saine raison , et n’ayent point cherché à légitimer , en quelque sorte , leur future usurpation , en la voilant des formes constitutionnelles ; mais tel est le sort réservé aux œuvres de ténèbres et d’iniquité que leurs abominables auteurs , avec quelque précaution qu’ils ourdissent leurs trames , se décèlent toujours par quelqu’endroit. Cette idée nous rappelle l’ingénieuse fiction du bonhomme  Lafontaine , au sujet de l’Ane revêtu de la peau du Lion , qui , au moyen de ce déguisement , s’imaginait pouvoir en imposer aux autres animaux ; mais par malheur un petit bout d’oreille échappé découvrit tout le manège. Ce petit bout d’oreille , nous y voilà ; il prouve que l’imposture finit toujours par être reconnue, et que la vérité seule est de tous les temps , de tous les lieux et de toutes les saisons.

Ils ont assurément bâti sur le sable , ceux qui ont foulé aux pieds ou méconnu ces principes immuables , que la force d’un Etat réside essentiellement dans la classe d’hommes la plus nombreuse , et que tout pacte social qui n’est pas consenti par le plus grand nombre , est , sinon illusoire , du moins exposé aux plus fréquens revers. L’expérience de tous les siècles nous apprend que , qui voit ses intérêts et sa volonté compromis dans un contrat quelconque , soit par ruse , soit par force , soit par tout autre moyen illicite , s’il ne se lève pas tout à coup pour anéantir cette lésion manifeste , n’attend , à coup sûr , que l’occasion favorable pour revendiquer ses droits outragés. C’est ce que n’ont pas tardé à éprouver ces jongleurs diplomatiques , qui , se flattant en vain de fasciner les yeux de leurs concitoyens par de vains tours de passe-passe , ont bientôt soulevé contr’eux l’indignation et la vengeance publique.

Après avoir réfuté , par des argumens irrésistibles , les prétentions iniques et erronées , à la faveur desquelles les membres de ce prétendu sénat ont envahi les pouvoirs et les richesses de l’Etat , il est intéressant d’esquisser les divers caractères des différens individus qui com-

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posent cette association , que l’on pourrait, à juste titre , qualifier de Sénat du Port-aux-Crimes , ou plutôt de Sénat de Pétion, dont il est tout à la fois le meneur , le régulateur , le président et le demi-Dieu.

Qui s’offrira le premier à mes crayons ? Bon ! c’est ce gros joufflu de sénateur , boursoufflé d’orgueil et d’impertinence , décoré du titre de Conservateur , plus pour sa propre personne que pour celle des autres , qui , pour avoir laissé plus d’une fois sa dépouille au trébuchet , tel qu’un rat aguerri , échappé de maint et maint dangers , n’en continue pas moins à ronger le lard , jusqu’à ce qu’enfin il laisse son embonpoint et sa voracité au dernier piège qui l’attend ; Bonnet est son nom ; Bonnet qui , dès sa tendre enfance , nourri dans l’intrigue , n’a jamais proféré un seul mot qui ne fût dicté par l’esprit de mensonge , ou qui ne roulât sur des questions politiques , dans le but de corrompre l’opinion des gouvernés ; Bonnet qui ,  enorgueilli de porter la décoration d’un des premiers satellites du traître Rigaud , tant que ce roitelet a joui des faveurs de la fortune , a cru qu’il était de son honneur et de sa prudence , au moment de la dis grâce de son cher maître , de le renier , de l’abandonner  , et de faire rayer son nom de la liste de ses aides de camp ; Bonnet qui , antérieusement à ce fait honorable , ayant été délégué , conjointement avec Pinchinat et Sala , par son cher maître , auprès de Villatte , à l’effet de le déterminer à se défaire du général Laveaux , et de se rebeller contre l’autorité du gouverneur général Toussaint Louverture , n’a rien négligé pour s’acquitter fidèlement de cette louable commission ; Bonnet qui , député à l’époque du 28 Octobre dernier , pour rendre compte de l’horrible événement survenu au Port-aux-Crimes , au Chef du Gouvernement , siégeant pour lors au Cap , n’a pas rougi de profaner le caractère dont il était revêtu , en y employant son temps et ses soins à disposer les esprits à la révolte. Au reste ce Bonnet  est un des plus forts de la bande à laquelle il est associé , tant par son ancienneté de service , que par les divers tours d’adresse qui l’ont fait connaître avantageusement. Telle est la subtilité de ses doigts , qu’il vient de faire disparaître ; au grand étonnement des yeux les plus fins , une somme d’argent considérable , qu’il a escamotée des deniers affectes au payement de la troupe. Mais , quoique ses brillans succès ayent inscrit son nom , en lettres d’or , sur le frontispice du théâtre où il joue un des premiers rôles , il est forcé de s’incliner devant le squelette ambulant qui tousse à ses côtés , et de le reconnaître pour son maître en fait d’escrime. Au teint blême du personnage , à ses facultés blasées , à sa mine étique , à la tendance naturelle que sa tête et son corps ont vers la terre , comme s’il voulait s’empresser à y ensevelir avec eux le souvenir de ses forfaits , qui ne reconnaît Blanchet le jeune ? Sans doute l’habitude de pâlir et de méditer sur des inventions infernales , tout en disséquant son physique , a imprégné ses poumons des poisons que son  âme prépare et distille ; car une toux sèche , mais vengeresse , menace , à chaque instant , de disposer de sa frêle existence. Le voyez-vous sourire? A un certain mouvement convulsif qu’il éprouve lorsqu’il est satisfait , reconnaissez que le démon qui l’agite vient de lui inspirer un nouveau moyen d’exercer sa furie ; malheur à ceux dont les intérêts ou la sûreté entrent pour quelque chose dans ses combinaisons ! Si tout à coup un sombre nuage se répand sur sa physionomie , croyez qu’il s’afflige de ce que le sang coule trop lentement à son gré ; grimace-t-il des dents ? Frappe-t-il des pieds ? sachez qu’il s’indigne et se repent de n’avoir pas rendu le supplice des Mentor et des Boisrond , commun avec les autres aides de camp de sa défunte

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Majesté ; sachez encore que le souvenir amer de la journée du 1er Janvier 1807 , de celle des Gonaïves , de Saint-Marc et de l’Arcahaye , lui rappelle que la trahison n’a jamais réussi contre l’Autorité légitime ; que le bon droit est plus fort que les complots , et que tôt ou tard il arrive le moment où les rebelles expient leur infamie. Ce force né conspirateur , dévoré depuis long-temps d’une ambition démesurée ( ambition qui l’avait rendu tellement redoutable à Rigaud lui-même , que jamais ce dernier n’avait pu se décider a lui confier aucune place à commander ) n’a pas craint d’avouer publiquement , aux Gonaïves et par-tout ailleurs , qu’il était le principal auteur de la catastrophe qui a terminé les jours de l’infortuné empereur Jean-Jacques Dessalines. Non content de la réussite de ce projet abominable , il s’est constamment appliqué , par-tout où il s’est transporté , et notamment aux Gonaïves , à souffler , dans tous les cœurs , l’esprit d’intrigue et de sédition , et sa fureur ne s’est point assouvie , qu’il n’ait vu se développer sous ses yeux le germe des dissensions intestines. Que dis je ? s’il respire encore , ce n’est que pour les alimenter , et il ne cessera d’agiter les brandons de la guerre civile , que lorsque sa débile existence sera entièrement anéantie. Rien n’égale l’effronterie de ce cynique , qui , voulant toujours trancher de l’important , publie et se persuade lui – même que tout se fait par lui , et que sans lui rien ne pourrait s’effectuer ; image vivante et fidèle de la mouche présomptueuse , qui , s’agitant sans cesse et suant sang et eau autour du coche , s’imaginait que par son vain bourdonnement elle imprimait le mouvement à la machine.

La suite au Numéro prochain.

                             

R  A  P  P  O  R  T

F a i t  par le Chef de l’Etat – Major général de l’Armée , à S. E. le Président et

Généralissime des forces de terre et de mer de l’Etat d’Haïti , sur l’Expédition

des Gonaïves.

C’est en vain que les âmes bien nées , vraiment pénétrées de l’esprit national , de cet esprit qui seul régénère les Empires et les fait prospérer , se complaisaient dans la douce idée de penser qu’aux orages si souvent répétés qui ont ébranlé ce nouvel Etat , allait bientôt succéder une série désirable et non-interrompue de calme , de bonheur et d’abondance. Ceux pour qui le nom de patrie n’est pas un prétexte astucieux , pour qui les mots de paix et de prospérité ne sont pas une amorce trompeuse qui sert à colorer de perfides desseins , jugeant des autres par eux-mêmes , sommeillaient dans la confiance que leur inspirait la pureté de leurs cœurs ; mais ce rêve ne fut pas de longue durée. Un nuage épais , qui recélait dans ses flancs les ténèbres et la foudre , était prêt à éclater sur ce pays infortuné. Des têtes volcanisées , profondément scélérates , habituées à ruminer le crime , avaient sourdement préparé , du nord au midi de cette île , les élémens d’une nouvelle éruption qui s’apprêtait à tout engloutir. Encore quelques minutes , et ç’en était fait de nous , de nos enfans , de l’île entière ; il ne restait plus aux vrais amis de l’ordre , aux amans de la liberté , qu’à se couvrir la tête d’un crêpe funèbre , pour n’être pas témoins des derniers soupirs de la patrie expirante , si le Chef de l’Etat , plus prompt que l’éclair qui nous menaçait, n’eût accouru sur le bord de l’abîme pour en combler la profondeur. Les coupables auteurs de tant de maux ont vu fuir leurs bandes dispersées devant son égide protectrice. Un seul de ses regards les a tous pétrifiés.

Depuis long-temps la ville des Gonaïves était devenue le centre des complots liberticides, le repaire et le rendez-vous des émissaires du rebelle Pétion ; et un mot , le point de mire d’un prétendu sénat , qui , pour n’avoir pas tout à fait l’air de pomper inutilement tout le suc des produits territoriaux , détourne , de temps en temps , l’attention publique de ses monstrueuses dilapidations , en la fixant sur quelques opérations aussi honteuses que mal dirigées.

La suite à l’ordinaire prochain.

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L  O  I

Qui supprime le Droit de dix pour 100 , établi sur l’Exportation des Sucres ,

Cotons et Cacao ; et qui abolit la perception du Quart de Subvention imposé sur

les Fermier des Biens de l’Etat.

Le Conseil d’Etat , sur la proposition du Président et Généralissime des forces de terre et de mer de l’Etat d’Haïti , rend la Loi suivante :

Art. 1er. A compter du 1er Juillet prochain , le droit de dix pour 100 , établi par l’article 1er du Décret du 2 Septembre 1806 , est et demeure supprimé sur l’exportation du sucre , coton et cacao; il n’est conservé que sur le café.

  1. Il sera , dorénavant , loisible à tout bâtiment étrangers ou autres , d’exporter librement les sucres , cotons et cacao , sur lesquels il est défendu de percevoir aucun droit quelconque.
  2. Le droit du quart de subvention imposé sur les denrées des fermiers de l’Etat , par l’article 5 du Mode a’affermage , des biens domaniaux , du 22 Décembre 1804 , sera dès ce jour supprime.
  3. Les fermiers de l’Etat ne seront plus assujetis à d’autres charges qu’au payement du prix de leurs fermes.
  4. Le Surintendant général des finances fera tenir strictement la main à l’exécution de la présente Loi.

Fait au Cap , le 20 Juin 1807 , l’an quatre de l’indépendance.

A. Vernet , Toussaint Brave , Martial Besse , Jean – Philippe Daux , Raphaël Manuël , Jean-Baptiste Juge , Fleury.

P A U L   R O M A I N , doyen.

M a g n y , secrétaire.

                                                           

Nous , président et généralissime des forces de terre et de mer de l’Etat d’Haïti , avons sanctionné et sanctionnons la présente Loi , ordonnons qu’elle soit revêtue du sceau de l’Etat , publiée et exécutée dans toute l’étendue du territoire d’Haïti.

Donné au palais du Cap , le 21 Juin 1807 , l’an quatre de l’indépendance.

H E N R Y   C H R I S T O P H E.

                                                           

Extrait de l’Ordre du jour du 29 Juin dernier.

Le désir ardent du Gouvernement d’améliorer le sort du cultivateur , des propriétaires et des fermiers , et de donner à la première denrée de l’Etat une valeur proportionnée aux travaux pénibles que demande sa culture , avait porté le Gouvernement à faire acheter toute cette denrée pour le compte de l’Etat , à un prix supérieur à celui du commerce. Il en a résulté , pour le cultivateur , un bénéfice évident , puisque leur revenu a augmenté , sur le champ , d’un tiers au moins ; mais la malveillance ayant cherché à jeter de la défaveur sur cette opération , qui n’avait d’autre but que de donner du prix et de la valeur aux denrées de notre pays et de faire le bonheur de nos concitoyens.

Le Président , toujours attentif à donner au peuple des preuves de sa sollicitude et  de son désintéressement , vient de donner des ordres de discontinuer l’acquisition des cafés pour le compte du Gouvernement ; il prévient en consequence MM. les Fermiers ou Habitans , qu’il ne sera plus acheté , par l’administration , de café entre leurs mains ; ils ont la libre disposition de vendre leur café de la manière qu’ils jugeront à propos et a qui bon leur semblera.

                                                                                                                                                           

A  V  I  S    D  I  V  E  R  S.

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Au Cap , chez  P.  R o u x , imprimeur de l’Etat.

2 Juillet 180716 Juillet 1807

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